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La mort de Mozart, entre légende et réalité...

La question qui a suscité le plus de controverse et d'intérêt est sans doute la maladie ayant entraîné la mort de Wolfgang en décembre 1791. Rien ne prouve avec certitude qu'il ait été souffrant en cette année avant la fin du mois d'août. D'après Niemetschek, lors de sa visite à Prague (du 28 août à mi-septembre) "Mozart était malade et prenait continuellement des médecines; son teint était pâle et sa mine triste." même s'il affichait souvent sa bonne humeur habituelle il fut empli d'une telle mélancolie en quittant ses amis qu' "il fondit en larmes". Quels qu'aient été les maux dont il souffrait à ce moment là, étant donné son emploi du temps des semaines précédentes, Wolfgang était probablement au bord de l'épuisement nerveux.
On ne sait s'il continua de manifester des symptômes de maladie à son retour à Vienne mais les évènement semblent avoir pris leur tour décisif à la fin du mois d'octobre. C'est par un beau jour d'automne alors qu'il était parti se promener au prater avec Constanze que Mozart lui dit qu'il pensait avoir été empoisonné. D'après Novello " il sentit une grande lourdeur dans les lombes et une grande langueur qui le gagnait par degrés." Les Novello disent en fait que cet incident eut lieu six mois avant la mort de Mozart mais pour que leur témoignage concorde avec les récits de Niemetschek et de Nissen, on peut vraisemblablement penser qu'il s'agit d'une erreur pour six semaines, ce qui situerait l'évènement aux alentours du 24 octobre. Les bulletins météorologiques de VIenne feraient pencher pour le 20 - 21 octobre. L'idée qu'il avait été empoisonné poursuivit Mozart par intermittence à mesure que sa santé déclinait. Selon Nissen, Mozart s'alita vers le 20 novembre : "Sa maladie mortelle dura quinze jours durant lesquels il resta alité. Elle commença par un enflement des mains et des pieds et une impossibilité quasi complète de mouvement suivie ensuite de soudains vomissements - maladie qu'on appelle fièvre militaire aiguë. Il demeura parfaitement conscient jusqu'à deux heures avant de s'éteindre." Sa belle soeur, Sophie Haibel raconte qu'elle lui fit "une chemise de nuit qu'il pouvait enfiler par devant en raison de son enflement et il ne pouvait pas se retourner". Deux jours avant sa mort, le 3 décembre, il parut aller mieux mais lorsque Sophie revint le lendemain, Constanze lui confia "Cette nuit il allait si mal que je pensais déjà qu'aujourd'hui il ne serait plus en vie; si cela se reproduit aujourdh'hui il mourra cette nuit." Wolfgang lui-même était persuadé que sa fin était proche "J'ai déjà le goût de la mort sur la langue". Les Novello donnent ensuite le récit détaillé que voici tiré d'un entretien avec Sophie Haibel: " Vers le soir ils envoyèrent chercher le médecin qui soignait Mozart, lequel se contenta de dire qu'il viendrait "dès que l'opéra serait fini". A son arrivée, il ordonna à Mme Haibel de baigner les tempes et le front de Mozart de vinaigre et d'eau froide. Celle-ci exprima sa crainte de voir le froid soudain nuire au malade, dont les bras et les jambes étaient très enflammés et enflés. Mais le docteur persista dans ses ordres et Mme Haibel appliqua par conséquent une serviette humide sur son front. Mozart eut aussitôt un très léger frisson et très peu de temps après il expira dans ses bras." Mozart mourut donc vers une heure du matin le lundi 5 décembre 1791 d'une "fièvre militaire aiguë" selon le registre de décès. Une lettre datée du 10 juin 1824 du premier médecin autrichien Eduard Guldener à Guiseppe Carpani donne des compléments d'indication sur ce diagnostique du docteur Closset, médecin de Mozart. Guldener n'avait pas soigné Mozart durant cette maladie finale mais il était en étroite relation avec le docteur Closset et avait vu le cadavre de Mozart. Il se donne grand peine pour souligner l'aspect ordinaire - presque épidémique - des symptômes qui avaient non seulement conduit Closset à un diagnostic assuré mais lui avait en outre fait prédire précisément les circonstances et l'instant de la mort. D'après Guldener, Mozart souffrait de fièvre rhumatismale qui a provoqué ce qu'il appelle "un dépôt à la tête" dont Carl Bär (1972) a montré que c'était ce qu'on tenait alors pour la phase terminale dune fièvre rhumatismale. L'expression "fièvre militaire aiguë" n'est pas contradictoire car elle désigne, sans plus de précision, une fièvre rhumatismale avec éruption. En tant qu'il souffrait de fièvre inflammatoire, Mozart fut sans doute soumis à des saignées par son médecin, ce qui n'a put qu'accélérer sa fin.
Le diagnostic de fièvre rhumatismale ne recouvre peut être pas la maladie de Wolfgang de début septembre mais la "langueur" et les "douleurs dans les lombes" d'octobre sont des symptômes plausibles d'attaque. Il faut en outre préciser que Mozart avait déjà au moins une fois souffert de fièvre rhumatismale à l'âge adulte (août - sept 1784) et qu'il s'agit d'une maladie pouvant être chronique.

Sources:
Dictionnaire Mozart - Sous la direction de H-C Robbins Landon
Mystérieux Mozart - Phillipe Sollers
Mozart aimé des dieux - Michel Parouty
Wolfgang Amadeus Mozart - Jean et Brigitte Massin
Mozart - Albert Einstein
La vie à Vienne à l'époque de Mozart et de Schubert - Marcel Brion
Tout Mozart - Philips Classics Productions